ESKANOUIL'
16Mai/123

Sabaidee-dee-dee !

CHAPITRE 1 : LA FRONTIERE LAO

Le 4 mars 2012, nous franchissons une espèce de barrière séparant le Royaume Khmer de la République démocratique populaire Lao. Pas grand monde n’est là pour nous accueillir, seulement une baraque servant de poste de douane et quelques cabanes en bois. Nous devons franchement nous baisser pour pouvoir interpeller le douanier à travers sa fenêtre ouverte. Passeports, visas, tout est OK, manque plus que le tampon officiel… mais, pour que le douanier las daigne lever son poignet, il doit nous en couter un dollar par geste. Nous refusons, nous nous révoltons, nous nous dédaignons, nous négocions, mais pas moyen. Deux personnes attendent derrière nous et nous finissons par lâcher un dollar plus quelques uns de nos derniers Riels, le tout avoisinant les deux dollars, mais embêtant suffisamment notre ennemi en uniforme pour satisfaire nos égos. Nous discutons rapidement avec les deux français de la file d’attente ; ils sont entrain de remonter le Mékong en quête d’images pour un futur reportage ; puis croisons sans paroles un chinois à pédales, suréquipé, et enfin reprenons notre route sur les selles de nos chers compatriotes : Babeth et Patrick.

CHAPITRE 2 : PREMIERS COUPS DE PEDALES EN TERRITOIRE LAO

Nous nous engageons sur l’unique et large route disponible. Le décors est tout aussi désertique que dans le pays précédent, et notre ami le Mékong, avec son humidité et sa passable fraicheur, nous manque. Nous prenons donc la première bifurcation nous ramenant, d’après la boussole, près du fleuve. Effectivement, nous débarquons dans un minuscule village portuaire où nous profitons d’un peu de civilisation pour nous restaurer, s’abreuver et changer quelques Riels cambodgiens en monnaie locale : le Kip. Le change est très simple, dix mille Kip pour cinq mille Riel pour vingt-cinq mille Dong (Vietnam) pour un euro. Nos deux premières soupes de noodles nous couterons deux de nos premiers billets de dix mille Kip, soit un euro la soupe, un peu plus chère que nos précédentes habitudes… arnaques ? Peut-être, mais bon, c’est le début.

CHAPITRE 3 : LES CASCADES DE KHONE PHAPHENG

Après avoir tenté un chemin un peu trop « VTT » au goût de nos vélos et de nos bras, nous retrouvons la grande route numéro 13 et son bitume. Le soleil frappe fort sur nos chapeaux asiatiques et nous accueillons joyeusement le panneau d’intersection indiquant : « <-- Khone Phapheng waterfalls 2,5 Km ». Deux kilomètres et demi plus loin nous tombons nez à nez avec une barrière et un Lao patient, avide de droit de passage. Nous examinons les tarifs : 5000 Kip pour les locaux, 20000 pour les étrangers…

SEB : « Ba ! Qu’ils aillent se faire foutre avec leurs  waterfalls  à la con, demi-tour ! »
MARJO : « Nan nan, on n’est pas venu pour rien et puis moi je veux les voir ces cascades, je vais lui parler… »

Marjo, décidée, parlemente avec l’autochtone et réussit à se faire offrir le passage, puis elle payera celui de Seb avec des Riels : ça de moins à changer pour plus tard. Nous rejoignons le bras du Mékong avec quelques petits laos à l’arrière de Patrick. Les cascades sont impressionnantes de grondements et de débit d’eau blanche et tout est fait pour pouvoir les observer : abris anti-soleil, boissons fraiches hors de prix, stands de poissons séchés… A peine plus loin, un village de restaurants, stands et boutiques de souvenirs travaille toute la journée à vider le porte feuille des quelques touristes imprudents s’étant écartés du trajet « bus climatisé – cascades ». Le soir venu, il se transforme en village fantôme, les travailleurs rejoignant leurs vrais villages, quelques kilomètres plus loin.
Nous nous baignons dans l’eau rafraichissante des petits bains formés par les plus modestes des cascades, séchons à l’ombre d’une araignée sur-proportionnée, et observons les techniques de pêche des gamins bronzés, en slip. Puis, las de repartir de cet endroit frais et reposant, nous installons notre campement pour la nuit au bord d’une petite plage de sable déserte. Face à un beau feu de bambous secs, notre première et fameuse Beer lao à la main, nous nous laissons bercer par les clapotis de la minuscule marée fluviale.

CHAPITRE 4 : LE KAO NIAO

On plie bagage avec habitude pendant que les pêcheurs déploient leurs grands filets avec précision. Retour sur la grande et chaude route numéro 13. Le peu de population, de villages, et donc d’eau nous alerte quelques peu. Nous finissons par rejoindre notre compagnon d’itinéraire en bifurquant pour un petit village au bord du fleuve. Ce dernier contient, en dehors des habitations très modestes s’étendant le long de la rive, quelques guest-houses, quelques restaurants et quelques boutiques touristiques déployés autour de l’intérêt essentiel de la localité : le port. Des bus climatisés et mini vans métallisés débarquent leur équipage de backpackers exotiques - chinois, thaïs, australiens, ou issus du vieux continent – pour en remplir méthodiquement, à la file indienne, les nombreuses et légères barques à moteur. Celles-ci défiant ensuite le courant du puissant fleuve pour aller percer les secrets de ses fruits les moins défendus : les îles. Le temps d’une journée, nous observons ces vas et viens de sacs à dos mal réglés et de chapeaux de cowboys américains ; goutons à l’alcool local, le laolao, avec les sourires locaux ; et enfin, faisons la rencontre de deux voyageuses française et italienne, qui nous feront faire la rencontre de notre futur meilleur ami du Laos : le kao niao.

Le kao niao : est une variété de riz spécial qui, après la cuisson, donne l’impression d’une pâte blanche presque uniforme au touché collant. En français, on l’appelle le « riz gluant », en anglais le « sticky rice ». Traditionnellement, les laos le cuisent à la vapeur en utilisant une sorte de panier en peau de bambou tressée, en forme de chapeau de pape inversé (ou de filtre à café en papier déplié). Ils posent le récipient rempli de riz sec sur une marmite d’eau bouillante (en faisant attention à ce que l’extrémité ne trempe pas dans le liquide) et attentent le temps nécessaire pour que le riz devienne collant et donc prêt à être consommé. Ils retournent le tout une ou deux fois pendant la cuisson.
Le kao niao est ensuite servi dans des paniers traditionnels (toujours en peau de bambou tressée) en forme de gros champignons. Le couvercle des paniers permet de maintenir le riz au chaud et de le protéger des insectes. Au moment du repas, les paniers, de différentes contenances adaptées au contenu, sont disposés autour des autres plats de façon à ce que chacun puisse y avoir accès facilement. On pioche alors avec la main droite dans le riz gluant pour en faire une boule compacte et, soit la manger nature, soit la tremper dans la sauce (épicée) des plats, soit s’en servir pour saisir la viande découpée, les légumes frits ou les branches de bambou bouillis.
Avec le kao niao, on ne mange jamais pas assez et il faut quelques temps pour s’habituer au poids de son estomac. L’autre avantage est que l’on trouve du riz gluant de partout, dans les restaurants ou dans la rue, vous pouvez vous faire servir votre dose de kao niao dans un sac plastique, à consommer le temps voulu.

CHAPITRE 5 : L’ILE DON KHONG

Décidés à profiter de nos vélos pour ne pas nous engouffrer dans les masses de touristes, nous ne traversons pas le fleuve pour rejoindre les îles paradisiaques, mais revenons sur l’incontournable route numéro 13. Nous parcourons la dizaine de kilomètres brulants qui nous sépare d’un autre petit village au bord du fleuve et qui doit nous permettre de rejoindre la plus grande des îles, apparemment moins fréquentée. Arrivés au bord de l’eau, un laotien nous propose ses services de « taxi-boat » pour la modique somme de 40000 Kip par personne, soit 8 euros pour traverser les quelques deux ou trois cents mètres nous séparant de l’autre rive.

SEB ET MARJO, en cœur : « A d’autres !! »

Nous suivons alors un petit sentier de terre et de bananiers, longeant la rive jusqu’au village précédent. Nous découvrons alors quelques habitats lao, pour l’instant moins rustiques que leurs voisins Khmers, plus grands et d’apparence plus solides. A quelques kilomètres des spots touristiques, les sourires reviennent ainsi que les regards interrogateurs et chaleureux. Les interminables nuées de « hello » cambodgiennes ou vietnamiennes, se transforment ici en « sabaidee » chantants : la salutation lao.
Nous arrivons enfin au point d’embarquement officiel des véhicules. Plusieurs espèces d’embarcations composées d’un assemblage de trois coques de bateau, d’un gros moteur à hélice, d’une barre de direction circulaire et de planches de bois clouées pour relier le tout, attendent que les voitures, bus ou camions embarquent sur leur pont instable. Nous, nous attendons le prochain « bac lao », ayant raté de peu le dernier parti.

SEB ET MARJO, toujours en cœur : « How much KIP ? » (« Combien ça coute ? »)
HOMME LAO, tendant le doigt en direction d’un radeau motorisé : « Small one, twenty, each » (« 20000 KIP par personne, pour le radeau »)
SEB ET MARJO : « And the big one ? » (« Et le gros bateau pourri ? »)
HOMME LAO, avec regret : « Ten, but wait » (« 10000 KIP, mais faut attendre les gars »)
SEB ET MARJO, échangeant un regard complice : « Ok, on attend »

Lorsque le tri-coques rustique enfonce enfin son pont dans le sable, nous embarquons dessus gentiment en précisant qu’on connait le prix. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’autre véhicule en vue et que l’engin ne va pas faire le déplacement pour cinq petites roues et deux paires de jambes. L’un des marins d’eau douce nous interpelle alors.

MARIN D’EAU DOUCE : « Small one, ten, ok… »

On hisse les vélos sur le radeau à l’aide de deux petites planches pour Patrick, une moto et deux gamins nous rejoignent puis on traverse le fleuve. Comme à chaque traversée, une rude montée ensablée nous attend de l’autre coté. La nuit tombe, on trouve un lit, du kao niao et du porc cuit à la noix de coco, demain, on fait le tour de l’île !
Il n’y a presque rien sur cette île, des rizières vertes fluorescentes, des cabanes en bois, du bétail, des cocotiers… mais on est contents. En passant rapidement devant une petite fille, un mignon et chantant « Saibaidee-dee-dee ! » nous restera longtemps dans la mémoire. On se baigne dans l’un des bras du Mékong sous les regards intrigués d’une bande de buffles immergés jusqu’aux oreilles. Prévenus, avec les kramas Khmers autour des fesses et un T-shirt pour Marjo, notre nudité blanche ne les choquera pas plus que cela. Encore du kao niao à midi (plus qu’il n’en fallait pour une somme plus que modique), on décide ensuite de rejoindre le continent avant le soir. Le problème, c’est qu’on est à l’autre bout de l’île et il n’y a pas de village pour nous permettre le passage. Après enquête, on dégotte un jeune ado lao et flemmard qui voudra bien démarrer sa longue et fine barque moyennant quelques billets. De l’autre coté : rien. La nuit tombe.

CHAPITRE 6 : LES OUVRIERS

Une route large, mais défoncée, nous indique un chantier en cours. Effectivement, les travailleurs rentrent les uns après les autres vers leur petit campement de fortune : quelques poutres, une bâche, des supports en bois surmontés de fins matelas en plastique et une cuisine aménagée pour l’occasion. Demandant notre chemin à l’ingénieur du groupe (celui qui parle, un peu, anglais) et précisant qu’on possède une tente, nous nous voyons invités à partager un bout de sol boueux pour notre campement, un repas pour notre estomac et de la bière pour le moral.
Le cuistot, aux commandes de sa bécane sur laquelle, heureusement il reste encore deux roues et un moteur, dépose à coté de la caisse de bière entamée deux gros canards blancs, vivants et ficelés. Un autre ramène une caisse de Beer lao supplémentaire et un seau de glaçons. Deux caisses de douze bouteilles de soixante centilitres de bière, une dizaine d’ouvriers, un ingénieur, son jeune assistant, deux français et… un verre : « Lao style ! ». L’un casse la glace, l’autre s’occupe de remplir le verre, le dernier boit cul sec et rend le verre suffisamment rapidement pour que la douzaine d’autres gosiers assoiffés n’attendent pas trop longtemps leur tour. « Lao style ! »
L’apéro entamé, l’un des chauffeurs d’engins de chantier torse poils nous montre les deux gros canards en s’exclamant « barbecue ! »

SEB, regardant les animaux avec envie : « Hum ! Des grillades ! Depuis le temps que j’en rêve ! »
MARJO, regardant les animaux avec pitié : « C’est terrible d’attendre sa mort comme ca… »

Le cuistot se lève et contre toute attente attrape le petit coq planqué sous l’une des tables, le plume puis lui tranche la gorge d’un coup de machette doux mais assuré. Il récupère le sang, découpe l’animal et le cuit de la tête aux pieds dans sa marmite au feu de bois. Lorsque kao niao et coq bouilli sont prêts, l’équipe se rassemble debout autour d’une haute table et mange. Seb, ayant trop mangé à midi et déçu par l’annonce falsifiée du barbecue, est pris d’une soudaine envie d’aller s’isoler dans la sombre forêt de bambou pendant que Marjo dîne avec nos nouveaux copains.

CHAPITRE 7 : AUTOSTOP-VELO (1)

Le lendemain matin, un morceau de « Scorpions » sortant de la cabine d’un des poids lourds nous réveille. On saute sur nos vélos et entamons le passage en construction qui doit nous ramener sur notre route numéro 13 préférée. Malheureusement, après un bon kilomètre, la terre tassée se transforme en sable fin. Pas moyen de pédaler, il faut pousser. Le soleil s’est levé et nous aide à transpirer encore quelques kilomètres jusqu’à l’intersection. Petit déj’ : kao niao, œufs au plat et boite de hareng à la tomate. Le soleil monte et le moral descend. Il y a soixante kilomètres à parcourir pour rejoindre notre prochaine destination : Champassak.

MARJO, d’un air fatigué : « On a plus d’eau… »
SEB, observant un magasin de bord de route : « Là, il y a de l’eau, j’y vais »

Seb se rapproche d’une famille concentrée sur une tâche quelconque, un jeune homme s’approche nonchalamment de lui.

SEB, esquissant un sourire forcé : « Sabaidee, how much is the water ? »
JEUNE HOMME : « One : two, all : six »
SEB, observant le pack de bouteilles poussiéreuses : « Marjo ?! On en prend combien… ? »
MARJO, las : « Quoi ? Mais j’en sais rien moi, décide »
SEB, contrarié : « Mais j’en sais rien non plus moi et j’ai pas envie de réfléchir ! »
MARJO : « Quoi ? J’entends rien… ? »

Le jeune homme s’impatiente, Seb soupire, émet un petit « cop chai » (merci) et s’en va bredouille sous le regard interrogateur de Marjo. Après une bonne pause en plein cagnard et l’achat réfléchit du pack de six bouteilles d’eau, nous tendons nos pouces, appuyés contre Patrick. Une camionnette aménagée en mini-bus s’arrête, on tente la négociation mais le prix reste trop élevé. Il n’y a pas beaucoup de trafic, mais la plupart des véhicules sont soit des gros 4x4 pick-up, soit des camionnettes aménagées ou non pour le transport de passagers (sans compter les quelques énormes bus « VIP » faisant trembler le sol à chaque passage). Donc on n’a pas de souci à se faire pour les vélos. D’ailleurs une famille-camionnette nous embarque sur dix kilomètres, puis un jeune homme-camionnette sur dix autres kilomètres, jusqu’à une station service. La nuit tombe.

CHAPITRE 8 : CAMPING-TERRASSE

Plus possible d’avancer, il faut trouver où dormir. Autour de nous : trois maison, deux épiceries, une station service. On achète des œufs, des noodles et une boite de conserve, ce soir on expérimente les œufs aux plats à la façon « popote » ! La jeune femme de l’épicerie nous permet d’installer notre campement à coté de la maison et on se met rapidement à la cuisine. Si les œufs au plat sont une réussite (formant de petits pancakes croustillant), les noodles-fourmis sont immangeables. Le terrain n’étant pas idéal pour la tente, la famille nous propose d’installer notre abri devant la maison, sur une espèce de table-lit. Par pitié ou par générosité, ils nous invitent à leur table manger le kao niao accompagné de sardines grillées et de soupe de bambou épicée. Au milieu de la nuit, le ciel gronde et les gouttes tombent sur notre simple moustiquaire non abritée. On se déplace sur la terrasse de la maison, à l’abris de la pluie, mais pas du puissant néon blanc.

CHAPITRE 9 : AUTOSTOP-VELO (2)

Au petit levé du jour on ouvre l’œil qu’on n’a pas beaucoup fermé de la nuit. Fatigués, on se poste de nouveau au bord de la route, le pouce levé. Un bus-camionnette s’arrête et ça commence à parler argent, mais petit problème : avec les dépenses de la veille, il ne nous reste plus que 48000 KIP dans le portefeuille, le reste étant des RIEL que les chauffeurs n’acceptent pas. Les négociations commencent à partir de 100000 KIP pour nous et nos vélos sur 40 bornes... Un, deux bus s’en vont, mais Marjo tente le tout pour le tout avec le troisième.

MARJO : « we have just 48000 KIP, no more ! Take us or let us here,under the rain … please ! »

Le chauffeur amusé accepte, on embarque les vélos au milieu des bancs aménagés pour les passagers et on parcourt les quarante kilomètres.

CHAPITRE 10 : CHAMPASSAK

On vide le portefeuille de toute sa monnaie lao pour payer notre chauffeur et on pédale en direction de Champassak. Petit hic : le village se situe de l’autre coté du fleuve, il faut donc prendre un bateau. Mais un bateau, ça se paie !
N’ayant plus un seul KIP en poche, on tente de refourguer nos RIEL, mais pas moyen. On arrive finalement à embarquer sous promesse de revenir payer lorsqu’on aura retiré à la banque du village. Quelques manœuvres très approximatives du gros tas de bois et de métal flottant plus loin, on accoste non sans percuter plusieurs fois d’autres gros tas de bois et de métal flottants. Seb manque de se casser la jambe en trébuchant dans l’un des trous du pont en bois, voulant remercier l’homme qui vient de nous offrir le passage.
Nous cherchons ensuite un endroit où déposer notre fatigue accumulée, transportant par la même occasion une italienne un peu perdue sur la remorque de Patrick. Installés, reposés, nourris (au kao niao, ratatouille et œufs aux plats popote), hydratés (à la Beer lao et au coca-cola glacé) nous découvrons ce joli village et explorons le vieu et joli temple en ruine hidouisto-boudhiste du coin, qui nous confirme qu’on aurait pris plaisir à explorer les fameux temples d’Angkor du Cambodge.

CHAPITRE 11 : PAKSE (1) OU LE DERNIER VOYAGE A VELO (1)

Ca y est, c’est décidé. On se sépare des vélos, ou plutôt de Babeth et Patrick, à Pakse, deuxième plus grande ville du Laos, située à une trentaine de bornes de Champassak. Malgré la proposition du gérant de la guest-house de Champassak : cent dollars pour les deux vélos, nous décidons d’entamer un dernier voyage avec nos amis avant la séparation. Pakse étant une grande ville lao, cela signifie que c’est une petite ville pour le reste des pays de la planète. Notre première idée est d’essayer de renvoyer Patrick en France, par bateau, et de vendre Babeth sur le marché de la ville. Après quelques allers-retours entre l’office du tourisme, la poste et un endroit imaginaire où l’on pourrait renvoyer le tricycle, on abandonne l’idée. Reste à savoir où on va pouvoir vendre nos vélos chinois ? L’idée qu’ils puissent finir leur vieux jours dans une belle et verte campagne à transporter des gamins et des bananes nous plait, et puis, on n’est enfait pas encore prêts à s’en séparer… demain, direction la campagne du plateau des Bolaven, à vélo !

CHAPITRE 12 : PAKSONG OU LE DERNIER VOYAGE A VELO (2)

Ce matin on fait un tour dans le grand marché de Pakse, le « new market ». On y trouve de tout, nous, on achète juste ce qu’il nous faut : du pain, des légumes, des œufs, une petite poêle pour cuire les œufs (ou les oignons), du sucre, du café lao (version « café du peuple », le moins cher), de la lessive, du tabac local au doux parfum (aussi la version « du peuple »), et autres bricoles. Equipés comme jamais pour ce dernier voyage, on pédale le cœur léger mais, rapidement, nos jambes se font lourdes : ça monte et ça n’a pas l’air d’avoir envie de redescendre. « Tant pis, c’est le prix à payer ».
Après une nuit dans une guest-house de bord de route, et un repas copieux « à la popote », nous repartons au petit matin plus motivés que jamais. Mais le moral descend en même temps que nous n’en finissons pas de monter… encore 30 bornes comme ça, pas possible. On « stop ».
Une camionnette s’arrête. « Combien pour aller jusqu’à Paksong ? ». L’homme lève deux de ses doigts. « 20000 KIP, ok, c’est correct ». Il nous demande de payer d’avance. « Hé ho mec, tu nous prends pour qui ? Le service d’abord, le fric après ». L’homme ne parle pas anglais, ni français, nous ne parlons pas lao, la discussion s’arrête et on démarre. Trente kilomètres de montée plus loin, on arrive à Paksong. On descend les vélos du véhicule et Seb tend un billet de 50 000 KIP au chauffeur. « Désolé mec, j’ai pas de change ». L’homme regarde le billet avec surprise et interrogation, puis commence à s’exciter. Malgré la barrière de la langue, on comprend vite : les deux doigts levés signifiaient plutôt 200 000 que 20 000 KIP. « 20 balles pour faire 30 bornes ??! Mais pour qui il nous prend celui-là ?? ». Mais le bonhomme s’accroche et son entourage s’y met. On fini par lui lâcher le billet de 50 000, plus blessés d’avoir été pris pour des pigeons blancs que d’avoir perdu de l’argent.
Paksong est un village pas très intéressant, les guest-houses sont chères, on a vite fait le tour du marché, et l’aura de cette petite ville de campagne ne nous revient pas… vraiment pas l’endroit idéal pour vendre Babeth et Patrick.
C’est décidé, demain on rentre à Pakse !

CHAPITRE 13 : PAKSE (2) OU LE DERNIER VOYAGE A VELO (3)

SEB, MARJO, BABETH ET PATRICK, en cœur : « WWWWOOOOOUUUOOOUUU !!!! »

Quarante kilomètres de descente à travers les champs de café, les vendeurs de bananes et les forgerons aux étalages de machettes de toutes tailles, ça vaut le coup ! Une belle façon de dire au revoir à nos deux compagnons.
Arrivés à Pakse, on ne perd pas de temps. On pose nos affaires dans une chambre louée, on nettoie rapidement les vélos, on passe à l’office du tourisme pour avoir une espèce de pancarte en papier où il est écrit en lao « on veut vendre nos deux vélos », puis on se dirige vers le « new market ». On fait le tour du marché en montrant notre papier, puis on s’installe dans un coin en attendant. Les premiers intrigués sont les chauffeurs de touk-touk qui nous posent quelques questions puis font circuler l’information. Quelques temps après les premières propositions arrivent : « 50 dollars le tout ? Non, non, pas possible ! ». On devra couper court à cette première tentative de vente à cause d’un fort mal de ventre du côté de Marjo. Retour express à la guest-house, on retente demain.

CHAPITRE 14 : VENTE DE BABETH ET PATRICK

Le lendemain, sur de nous, nous réservons un scooter pour une balade de deux ou trois jours dans le plateau des Bolaven et partons en direction du marché pour signer notre vente auparavant. La matinée au marché ne porte pas ses fruits et nous revenons à la guest-house annoncer qu’on abandonne le projet « scooter ». On change d’ailleurs de guest-house pour un souci d’hygiène et profitons de la nouvelle pour nous faire faire deux belles pancartes marquées au feutre : le tricycle pour 90 dollars, la bicyclette à 30 dollars.
On retourne se poster au marché, à coté des chauffeurs de touk-touk et des gardiens de parking qu’on fait bien rire. Ils nous invitent à manger à leur table, puis nous retournons à nos ventes. Au bout d’un certain moment, une dame accompagnée d’une jeune fille vient nous parler en anglais, puis en français. Elle s’appelle Fanny en France et Seng au Laos. Elle est née au Laos mais à fuit son pays durant la guerre civile laotienne pour se réfugier en Thaïlande, puis en France. Maintenant elle est française et vit avec son mari la moitié de l’année en France, l’autre en Asie du Sud-Est. Nous discutons des vélos pendant qu’une dame tourne autour de nos amis, l’air très intéressée. Il y a quelques échanges de paroles en lao puis Fanny se tourne vers nous et explique calmement : « enlevez les pancartes des vélos et rejoignez-moi chez moi, je vous achète les vélos pour 850 000 KIP, il y a des choses que je ne peux pas supporter d’entendre… ». Notre dernier prix était descendu à 800 000 KIP. Sans trop hésiter, nous écoutons Fanny et la rejoignons chez elle. Elle nous accueille dans la maison de son père avec toute sa famille, les grands et les petits, et nous comprenons que les vélos vont faire le bonheur des enfants, pour aller au marché, à l’école ou juste pour se balader dans le quartier : ça nous plait. On discute un moment avec Fanny puis nous la revoyons le soir même pour l’enterrement de vie de jeune fille d’une de ses nièces, ambiance kao niao et Beer lao au programme !

CHAPITRE 15 : LE PLATEAU DES BOLAVEN EN SCOOTER

Le lendemain, ça y est, on a notre scooter loué pour deux jours. On roule, chacun notre tour au guidon, à travers le plateau des Bolaven. On s’arrête à Tadlo où l’on se prend une petite chambre-bungalow en bambou. On se fait arroser par une forte averse sur la route d’un marché textile imaginaire, croisons une manifestation religieuse et joyeuse, mangeons des pancakes à la banane, faisons trempette dans la rivière, nous faisons surprendre par un éléphant « porte touristes » puis rentrons direction Pakse. En chemin, on décide de tout de même aller voir l’une des fameuses waterfalls de la région. Malheureusement l’entrée est payante. Et payer, on n’aime pas. Le patron de l’unique café posté là vient nous parler. Il s’appelle Mr Inpong Sananikone, il est français mais est né au Laos. Il a vécu toute sa vie en France et vient profiter de ses vieux jours en cultivant du café au Laos et en tenant son établissement, proposant de déguster son propre café et plus encore. Une nouvelle averse nous surprend et notre ami nous propose de venir boire un thé à l’abri. Nous discutons. La pluie ne finissant pas et la nuit tombant, Mr Inpong Sananikone nous invite à manger un succulent repas à base de côtelettes de chevreuil et autres mets délicieux. Lorsque la pluie cesse enfin, il fait nuit. Nous quittons notre ami et nous engageons sur la route du retour. 4x4 plein phares, chiens, vaches et lao bourrés seront les différents dangers contre la vigilance de Seb, mais nous arriverons finalement sain et sauf à Pakse.

Une bonne nuit de repos, demain on part à Vientiane !

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Commentaires (3) Trackbacks (0)
  1. Et bah que d’aventures !
    La séparation avec Babeth et Patrick n’a pas été trop dure?
    En lisant tout ça, on remarque que la négociation est de mise dans ce pays! ça ne doit pas être facile tous les jours, surtout avec la barrière de la langue!
    en tout cas je trouve que vous vous en sortez à merveille!

    Continuez! vos articles se dévorent du début à la fin!

    Antus

    • siii Babeth et Patrick nous manquent mais Zaza nous a aidé à nous réconforter.. vous en saurez bientot plus !

  2. Waou, ça fait du bien de vous lire par un dimanche soir pluvieux à Lyon!
    Petite pensée spéciale pour vos deux vélos… ils seront sûrement utiles et bien entretenus là où vous les avez laissés.
    L’aventure continue donc… à pattes, on attend la suite!
    Une grosse bise.


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